Débat sur l’interpellation  « L’ISOS et les articles du RPGA utilisés par la CDAP pour annuler un permis de construire délivré par la Municipalité, une bonne nouvelle pour le patrimoine bâti lausannois ? »

Intervention

En préambule, je tiens à remercier chaleureusement la Municipalité pour la réponse précise et détaillée apportée à mon interpellation, qui faisait notamment suite à la décision de la Cour de droit administratif et public (CDAP) du Tribunal cantonal de refuser le permis de construire délivré par la Municipalité pour un projet d’immeuble démesuré et mal intégré dans le quartier de la Gottettaz.
Le tissu urbain de la Ville de Lausanne évolue rapidement depuis la mise en vigueur du nouveau Plan général d’affectation (PGA) en 2006. Pratiquement tous les quartiers voient des maisons démolies et des immeubles plus grands et plus massifs construits à leur place. Ce processus de densification, s’il est louable et souhaitable afin de limiter l’étalement urbain, doit toutefois être tempéré en fonction de l’atteinte qu’il peut porter au patrimoine bâti préexistant.
Pour cela, tant l’Inventaire fédéral des sites construits d’importance nationale à protéger en Suisse (ISOS) que le Règlement du Plan général d’affectation lausannois (RPGA, art. 69) fournissent à la Municipalité les bases nécessaires pour imposer des restrictions au droit à bâtir des propriétaires lorsqu’un intérêt patrimonial est en jeux et qu’il s’agit de veiller à la bonne intégration des constructions dans leur environnement. Pourtant, le nombre d’opérations de démolition-reconstruction qui dépareillent dans leur environnement montre que ces outils ont peu été utilisés par la Municipalité au cours de la dernière décennie. Heureusement, la révision du Plan directeur communal (PDCom) en cours d’élaboration intègre les enjeux patrimoniaux de manière satisfaisante et il semble que la nouvelle Municipalité soit un peu plus attentive au patrimoine bâti, ce qui se ressent d’une part dans le programme de législature mais également dans sa pratique récente, puisqu’elle n’hésite visiblement plus à refuser certains projets, ce que nous saluons.
Dans la réponse de la Municipalité, je relève à satisfaction qu’elle reconnaît qu’ « il incombe au premier chef aux autorités communales de veiller à l’aspect architectural des constructions » et qu’ « elles disposent à cet égard d’un large pouvoir d’appréciation ».
Toutefois, la réponse municipale met bien en évidence les déficiences du Plan général d’affectation (PGA) actuel et précise que « c’est dans le cadre de la révision du PGA que le patrimoine lausannois pourra bénéficier d’une protection adaptée avec une portée juridique réelle, dans un document opposable aux tiers ». Si cette citation est malheureusement bien la réalité, elle est toutefois très inquiétante : que va-t-on donc faire en attendant 2021, échéance qui nous est donnée dans le meilleur des cas pour la mise à l’enquête du nouveau PGA ? La Municipalité reconnaît d’ailleurs que « dans l’intervalle, il est manifeste que certains secteurs ne bénéficieront pas toujours d’une protection suffisante ». Sans intervention, le patrimoine bâti lausannois va donc poursuivre sa lente mais certaine disparition. Et plus l’environnement bâti deviendra hétéroclite, moins il sera facile de refuser ensuite des projets portant atteinte au patrimoine.
Dans l’attente de la révision du PGA, nous souhaitons donc que la Municipalité fasse usage des outils dont elle dispose pour veiller à une densification respectueuse du patrimoine, particulièrement des ensembles bâtis dignes d’intérêt. Pour cela, elle peut notamment utiliser l’art. 69 du RPGA, l’ISOS, ou même déposer une zone réservée sur certains secteurs particuliers où un ensemble bâti digne d’intérêt mérite une protection.
Enfin, il est utile de mentionner que le programme de législature mentionne l’intention de mettre en place une commission d’urbanisme et d’architecture, ce que nous appelons de nos vœux au plus vite, la Ville de Lausanne étant une des dernières grandes villes suisses à ne pas en posséder. Elle permettra notamment d’évaluer en amont les projets, notamment au regard des critères d’esthétique et d’intégration.
Au vu de ces différents éléments, nous aurons une résolution à vous soumettre ce soir. Avant cela, je souhaite toutefois encore poser trois questions à la Municipalité :

  • où en est la procédure de révision du PDCom et quel est le calendrier approximatif de la suite de la procédure ?
  • quand est-ce que le préavis concernant le lancement de la révision du PGA sera-t-il soumis au Conseil communal ?
  • où en est le processus de mise en place d’une commission d’urbanisme et d’architecture ?

Je remercie d’avance la Municipalité pour ses réponses complémentaires.
Valéry Beaud