Postulat

Les beaux jours étant enfin de retour, ils s’accompagnent de l’usuelle
« transhumance » de toute lausannoise et tout lausannois
sur les bords du lac, afin d’y profiter de la météo clémente et
de la beauté des paysages lausannois. Cet attrait du lac s’avère
aujourd’hui de plus en plus marqué tant ses berges sont utilisées
et appréciées par chacune et chacun. Plusieurs des projets
récemment annoncés par la Commune de Lausanne – dont la création
d’une plage publique à Ouchy – répondent correctement à ce
souhait d’accès large aux rives. Le succès de récents bars
établis à Bellerive démontre tout aussi clairement cette envie
générale de profiter du Léman, tout comme le nombre de personnes
qui parcourent les cheminements piétonniers aux abords du lac.

La thématique de l’accès aux rives du lac doit également tenir compte de l’importance de ces rives, tant historique qu’émotionnelle. Habitées depuis 8’000 ans, elles portent en effet les traces de chaque époque, des nécropoles de Vidy (4’500 av. J.-C.) aux menhirs de Lutry (3’000 av. J.-C.), et servent encore aujourd’hui d’abris et de refuge à de nombreuses espèces animales, dont les oiseaux migrateurs1. Cette richesse des rives est d’ailleurs bien soulignée sur le site Internet de la ville, où l’on peut lire que « [a]u bord du lac Léman, les jardins s’avancent jusqu’à l’eau et laissent rarement la place à un chemin (…) [avec toutefois] de très belles exceptions[, p]ar exemple entre Lutry et Morges, [où] un chemin serpente entre rives du lac et jardins soignés, le long des plages sauvages ou des quais fleuris, sur près de 15 km. »2.

L’accès complet et libre au lac est par ailleurs expressément évoqué en
droit fédéral à l’art. 3 al. 2 let. c de la Loi fédérale sur
l’aménagement du territoire (« LAT »),
qui dispose qu’il convient notamment « de
tenir libres les bords des lacs et des cours d’eau et de faciliter au
public l’accès aux rives et le passage le long de celles-ci
 ».
Il est plus largement au centre de fréquents débats liés à la
privatisation de ces berges.

Lausanne, comme elle le prône elle-même, s’avère un bon élève en la matière. Il est en effet
possible, en hiver, de cheminer de façon quasiment discontinue des
frontières de la Commune de St-Sulpice à celles de Pully. Cette
« précision hivernale » est toutefois centrale, dans la
mesure où un point noir existe et demeure à ce jour en termes
de cheminement lacustre : là où se trouve la piscine de
Bellerive. Le chemin passant de la plage publique de Bellerive au
Quai du Vent-Blanc est en effet fermé du 15 avril au 15 octobre,
obligeant chacune et chacun à remonter sur l’Avenue de Rhodanie et
passer à l’arrière du bâtiment de la piscine de Bellerive, ceci
sur plus de 700 mètres.

Or, cela coupe directement la cohérence du cheminement au bord du lac,
prive le promeneur de la vue du lac et impose de passer sur une route
malheureusement bien fréquentée en termes de trafic – ceci sur
près d’un kilomètre. En outre, cela crée des complications avec
les différents flux de mobilité douce, les piétons occupant très
souvent la bande cyclable de l’Avenue de Rhodanie et se confrontant
aux rollers, skates et autres trottinettes.

Alors que l’importance de la piscine de Bellerive n’est plus à
démontrer, la nécessité de conserver des rives fermées est pour
sa part beaucoup moins compréhensible. Il est vrai que cette
fermeture pendant 6 mois s’explique par l’exploitation de la
piscine et la nécessité de permettre à ses clients d’accéder au
lac.

Il est toutefois également vrai que d’autres solutions existeraient
pour combiner ces deux intérêts, tout aussi rentables, notamment :

  • placer une entrée au sud-ouest de la piscine de Bellerive, ce qui permettrait aux personnes venant depuis Vidy d’entrer beaucoup plus facilement dans la piscine, sans devoir la contourner entièrement2 ;
  • rendre l’accès à la piscine de Bellerive gratuit, sur le modèle du célèbre Marzilibad de Berne, dont la piscine, l’énorme pelouse et l’accès à l’Aar sont libres de tout coût d’entrée3.

S’agissant spécifiquement de cette seconde possibilité, l’exemple bernois
devrait servir de modèle à la ville de Lausanne, tant l’engouement
de la population pour le Marzili que le succès du lieu sont énormes.
La vente de nourritures et de boissons, ajoutée à l’énorme
popularité du lieu, permettent dans ce cadre en grande partie de
compenser la gratuité des lieux.

A noter que les clôtures existant actuellement pour la période
hivernale permettraient vraisemblablement de mettre en œuvre ces
mesures (qu’il s’agisse de la première ou de la seconde)
facilement et sans grand coût d’infrastructure.

A l’heure où Lausanne met en avant ses rives et prône un nouvel
accès au lac, il apparaît essentiel de permettre à toutes les
lausannoises et tous les lausannois d’en profiter librement et sans
blocages inutiles !

Conclusions :

La présente initiative invite la Municipalité à étudier
l’opportunité de libérer toute l’année le cheminement passant
de la plage publique de Bellerive au Quai du Vent-Blanc. Ce faisant,
elle est également invitée à étudier la possibilité de (i) créer
une entrée sud-ouest à la piscine de Bellerive ou (ii) rendre
gratuit l’accès à la piscine de Bellerive, sur le modèle du
Marzilibad de Berne.

David Raedler
1 Voir notamment le Plan directeur cantonal des rives vaudoises du lac Leman de 2000.
2 La nécessité de créer une autre entrée à la Piscine de Bellerive a d’ailleurs été relevée par la Municipalité dans le cadre du Rapport-préavis n° 2012/43 « Bellerive – plage Réponses aux postulats de M. Guy Gaudard et de M. François Huguenet, ainsi qu’aux deux nouvelles conclusions apportées par le conseil communal au rapport-préavis n° 2009/67 demande de crédit complémentaire », par. 6.2 et 6.3.

3
A l’image de toutes les piscines de la ville de Berne gérées par
une collectivité de droit public. A noter que plusieurs initiatives
émanant de conseillers communaux ont précédemment été déposées
en lien avec le parc de la piscine de Bellerive, aucune toutefois ne
proposant d’étudier la gratuité du lieu.