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Le béton est le matériau de construction le plus utilisé dans le monde. Or la fabrication de ciment, composante essentielle du béton, a un impact majeur sur l’environnement. La production de ciment repose sur des ressources en voie de raréfaction qui demandent des extractions de plus en plus néfastes pour l’environnement.

Au niveau des paysages et de la biodiversité, sa production nécessite de grandes quantités de roches calcaires, qui sont extraites au détriment d’espaces naturels parfois de grande valeur. La carrière d’Holcim à Eclépens, qui dévore peu à peu la colline du Mormont, en est un bon exemple.

Le ciment fait aussi partie des domaines où les attentes en matière de réduction des émissions de CO2 sont importantes. Cette activité est peut-être moins visible que l’industrie des énergies fossiles par exemple, mais le secteur fait clairement partie des grands émetteurs de CO2. Cemsuisse, l’interprofession du ciment, parle ainsi dans son rapport annuel 2019 de 382’000 tonnes de CO2 émises en 2018 en Suisse par ce seul secteur de production. À l’échelle mondiale, on parle de plus de 5% des émissions globales de CO2 induites par cette fabrication.

Le béton présente pourtant de nombreux avantages. C’est grâce au béton que les villes modernes ont pu se développer. Le béton a contribué à améliorer la qualité de vie dans les quartiers (assainissements des logements). C’est un matériau durable et solide dont la composition peut varier pour s’adapter à divers types de constructions. Il est présent partout, il relie (ponts), sépare (murs), protège (bâtiments), assure et est parfois un objet d’art. Le béton a aussi marqué tout un courant architectural incarné par le Corbusier qui a su valoriser de façon prodigieuse le caractère « brut » du béton.

Pourtant, ces matériaux arrivent probablement à un tournant. À l’heure de l’urgence climatique et de la chute drastique de la biodiversité , le béton présente de nombreux inconvénients dans la nécessaire transition écologique des villes. On ne va toutefois pas pouvoir s’en défaire de façon radicale. Un monde sans béton, ce n’est pas pour tout de suite…

On peut par contre prendre des mesures pour limiter sa consommation, ou réduire l’impact de sa production en menant une réflexion de fond sur le choix des matériaux qui composent le béton. Il existe en effet plusieurs façons de produire du béton. En fonction des matériaux choisis, on peut adapter ses propriétés aux besoins  de construction…

Holcim promet par exemple un “Béton zéro carbone ». En réalité, le nouveau produit du cimentier est loin d’être bon pour l’environnement. Ce produit permet certes d’économiser  jusqu’à 20% de CO2, par rapport aux méthodes traditionnelles. Le 80% des émissions produites restantes, sont néanmoins compensé par des financements de projets écologiques en Suisse et à l’étranger…

Il convient donc d’explorer en parallèle, les alternatives au béton traditionnel et de les employer partout où cela est possible. On pense tout d’abord au bois, matière première abondante dans nos régions, et puits de carbone intéressant. Le bois est d’ailleurs revisité pour des constructions modernes et esthétiques. Même les gratte-ciels s’y mettent comme la Brock Commons Tallwood House (Vancouver), tour de 18 étages érigée sur 53 mètres de haut.

D’autres alternatives existent encore, comme le béton allié à d’autres matériaux recyclés ou des techniques qui permettent de modifier sa composition en remplaçant le ciment par des résidus industriels issus de la combustion des centrales à charbon ou des biocarburants. On trouve aussi du béton végétalisé, qui se compose de végétaux dans des alvéoles qui absorbent le CO2 généré par la pollution (bon isolant).  D’autres solutions avec des matériaux insolites et biodégradables s’attèlent à ces enjeux de durabilité.

Avec l’EPFL, la Suisse et le canton de Vaud figurent parmi les leaders de la recherche mondiale sur ce matériau, et elle peut jouer un rôle central dans ce virage. Or, ces solutions sont trop peu utilisées dans la construction, et le recours au béton traditionnel semble malheureusement un « oreiller de paresse » pour de trop nombreux acteurs. Cela s’expliquerait par le poids des habitudes et des normes et par un conservatisme un peu trop prononcé des mandataires et des professionnels de la construction, sans doute nourris par la crainte de devoir assumer le risque de travailler avec de nouveaux matériaux. Enfin, le  poids des lobbies représentés dans les commissions normatives, et qui freinent le référencement de ces nouveaux matériaux ne doit pas être négligé. La SIA développe heureusement certaines normes norme (SIA 112/1) qui jettent les bases de la construction durable, avec des recommandations pour la gestion des ressources.

Cette motion a pour but de soutenir ces différentes démarches et de favoriser l’émergence de solutions alternatives au béton traditionnel. Nous proposons ainsi de modifier la loi sur l’aménagement du territoire et des constructions (LATC) pour que les projets de construction vaudois favorisent l’utilisation de matériaux de construction alternatifs et présentant un faible impact climatique et environnemental (proposition de modification en gras). Le canton de Vaud et certaines communes ont déjà montré par le passée leur volonté de faire preuve d’exemplarité en privilégiant l’utilisation du bois. Il nous paraît important de généraliser ces approche à l’ensemble des projets de construction.

Art. 90 Normes de construction

1 Le règlement cantonal fixe les normes applicables aux différents genres de constructions et de matériaux utilisés, en vue d’assurer la stabilité́, la solidité́ et la salubrité́ des constructions et de garantir la sécurité́ des habitants et celle des ouvriers pendant l’exécution des travaux. Il incite à l’utilisation de matériaux de construction à faible impact climatique et environnemental. Le droit fédéral est réservé.