Motion

L’impôt sur les successions constitue une forme d’impôt se retrouvant dans l’essentiel des pays industrialisés de l’OCDE[1]. Parmi les motifs justifiant un tel impôt, on cite avant toute chose le fait que l’Etat assume aujourd’hui nombre de tâches et de dépenses qui jadis, traditionnellement, incombaient exclusivement à la famille (éducation, assistance, soins en cas de maladie, etc.)[2]. En font également partie le constat que la succession entraîne un changement formel de propriété sur les biens concernés (et donc une transaction), l’accroissement de la fortune en découlant pour les héritiers et la redistribution nécessaire au regard des exigences sociétales garanties par l’Etat. Enfin, l’impôt sur les successions permet également un certain contrôle quant aux biens soumis à d’autres impôts qui pourraient avoir été dissimulés.

L’impôt sur les successions va toujours de paire avec l’impôt sur les donations, à la fois car les motifs le justifiant sont similaires et car la donation pourrait, sinon, être facilement utilisée pour contourner la charge fiscale applicable aux donations.

Au niveau suisse, tant l’impôt sur les successions que sur les donations relèvent exclusivement de la compétence des cantons qui le connaissent tous, à l’exception des cantons de Schwytz et d’Obwald. Dans ce contexte, tous les cantons percevant un impôt sur les successions – dont le Canton de Vaud – exonèrent ou réduisent le taux applicable au conjoint survivant et/ou aux descendants directs. C’est ainsi que l’on retrouve, à l’art. 20 al. 1 let. e de la Loi concernant le droit de mutation sur les transferts immobiliers et l’impôt sur les successions et donations (« LMSD ») une exemption applicable au conjoint ou au partenaire enregistré du défunt ou du donateur pour l’impôt sur les successions et les donations. D’autres dispositions prévoient des exonérations ou réductions de taux applicables à certaines autres personnes du cercle des proches du défunt ou du donateur, dont l’art. 31 al. 1 à 3 LMSD (exonération d’un certain montant pour chaque souche héréditaire de la première parentèle) et l’art. 35 LMSD qui assimile à des « parents » les alliés du défunt ou du donateur qui sont ou étaient également parents de son conjoint ou de son partenaire enregistré.

Contrairement à d’autres cantons, le Canton de Vaud n’accorde aucun régime spécifique aux concubins, qu’il s’agisse d’une exonération ou d’un taux préférentiel. Pourtant, alors que certains cantons les exonèrent entièrement (dont Nidwald et Zoug), la grande majorité leurs accordent en tout cas un taux préférentiel. La motivation suivie à ce titre réside dans le constat selon lequel l’Etat ne doit pas s’immiscer dans le choix de vie du contribuable, en traitant de la même manière les personnes liées par un mariage et celles qui privilégient le concubinage. Un constat qui avait déjà été posé de façon générale par le Tribunal fédéral dans un arrêt de 1992[3]. Ainsi, et autrement dit : en accordant une exonération au partenaire exclusivement lorsqu’il existe un lien de mariage ou de partenariat enregistré, la LMSD enfreint le principe d’égalité et la règle selon laquelle l’Etat ne doit pas s’immiscer dans le choix de vie de ses contribuables.

Au regard de ces constats, il apparaît donc nécessaire d’assurer une telle égalité. Dans le contexte budgétaire et financier actuel, il est toutefois central d’assurer que celle-ci n’entraîne pas une réduction ou perte des recettes liées à l’impôt sur les successions et les donations. Il est donc demandé que cette modification intervienne de façon neutre sur le plan des recettes induites par ces deux impôts.

A la lumière de ce qui précède, les signataires demandent au Conseil d’Etat d’assimiler, dans la LMSD et les règlementations y liées, les concubins aux conjoints et partenaires enregistrés, en assurant que cette mesure demeure neutre sur le plan des recettes.

[1] Cf. AFC, Documentation et information fiscale, Impôts sur les successions et les donations, Berne 2020, p. 1.

[2] Pour cette justification mise en avant par Eugen Huber, cf. AFC, op cit, p. 1.

[3] ATF 118 Ia 1.