Motion

La Loi sur la profession d’architecte (LPrA) date de 1966. Depuis son entrée en vigueur, elle a été révisée plusieurs fois et un nombre important de ses articles ont été abrogés. Son contenu ne semble plus être en mesure de répondre aux problématiques actuelles, alors que les professions de la construction doivent s’adapter à de nouvelles pratiques et un marché dynamique et en mutation.
Un récent arrêt de la cour de droit administratif et public du tribunal cantonal confirme cette observation. Cet arrêt conclut que cette loi n’est pas une base légale suffisante pour interdire à un architecte d’exercer sa profession, alors que de graves manquements à ses devoirs professionnels ont été reconnus.
En effet, dans le cas mentionné, la personne en question a été exclue de la liste des membres de la Société suisse des ingénieurs et des architectes (SIA) pour infraction grave aux devoirs de la profession prévus par le Code d’honneur de la SIA. Elle a cependant continué à accepter des mandats, constituant par là un risque grave pour la réputation de la profession, ainsi qu’occasionnant des dégâts matériels et pertes financières pour les personnes lui ayant fait confiance. Il est important que la LPrA puisse prévenir de nouveaux cas, avant qu’un bâtiment mal conçu et/ou mal réalisé vienne à mettre en danger la sécurité publique et entacher la crédibilité de l’entier de la branche.
Sans lien avec cette affaire, il est constaté que l’évolution des outils de travail (passage des plans dessinés à la main, comme à l’époque de la conception de la loi, aux plans numériques puis aux maquettes 3D) vient modifier le travail des architectes et de l’ensemble des professions impliquées dans le domaine de la construction.
Dans cette «révolution numérique », citons notamment le Building Information Modelling² (BIM) qui vise à une transformation fondamentale des méthodes de travail dans le domaine. Le BIM permet notamment d’intégrer l’ensemble des corps de métier (par exemple le génie civil, les techniques du bâtiment, le second-œuvre, etc.) dans une «maquette» ou modèle 3D. Il serait par exemple envisageable de manière technique, dans un avenir extrêmement proche, de pouvoir considérer une maquette numérique valable pour une mise à l’enquête publique en lieu et place des plans papiers, signé par un architecte habilité à le faire.
Ces transformations du métier des architectes et des ingénieurs en lien avec la révolution numérique pourraient également poser d’autres questions législatives, telles que la propriété intellectuelle du modèle BIM, les responsabilités en cas de défauts d’un bâtiment réalisé avec un modèle BIM, etc. La révision de LPrA pourrait ainsi être également utilisée de manière opportune pour poser les bases législatives des métiers d’architectes et d’ingénieurs d’aujourd’hui (le BIM étant déjà une exigence pour certains Maître d’ouvrage) et de demain (la révolution numérique ne faisant que commencer).
Etendre la portée de la LPrA à l’exercice de la profession d’architecte ou d’ingénieur civil et des professions apparentées (notamment, ingénieur en environnement et architecte-paysagiste) pourrait d’ailleurs s’avérer nécessaire³ , vu l’imbrication de plus en plus forte des prestations délivrées par ces professions pour assurer la bonne réalisation des ouvrages qui leur sont confiés.
La présente motion vise donc à une révision complète de la Loi sur la profession d’architecte (LPrA) en regard de sa vétusté et de son manque de portée législative pour cadrer correctement la pratique de la profession. Cette révision pourrait également permettre d’étendre la portée de la loi à l’exercice de la profession d’ingénieur civil et des professions apparentées et permettre de cadrer les défis que les nouveaux outils numériques posent à l’ensemble de la branche.
Etienne Räss
¹No affaire: GE.2016.0155, CDAP, 07.12.2016, Arrêté joint en annexe.
² A ce propos voir www. sia. ch
³ C’est d’ailleurs déjà le cas dans la République et Canton de Genève