Motion

Entrée en vigueur en janvier 2017, la loi fédérale sur la formation continue incite les employeurs privés et publics à favoriser le perfectionnement des employées et employés. Elle attribue à la Confédération et aux cantons la responsabilité de contribuer « à ce que la formation continue soit accessible à chacun en fonction de ses capacités » (art. 5 al. 3 LFCo).
S’il existe sur le marché des offres de perfectionnement performantes, les réponses apportées sont encore lacunaires pour améliorer les compétences de base. Il y a lieu d’accorder une attention particulière aux adultes les moins qualifiés, illettrés ou allophones, qui ont plus de difficultés à accéder aux cours existants de formation continue. Car la maîtrise des compétences de base (lecture, écriture, expression orale dans une langue nationale, mathématiques élémentaires, technologies de l’information et de la communication) favorise tous les apprentissages au long de la vie et rend possible la participation à la vie sociale.
Une section entière (5) de la loi fédérale concentre les efforts pour promouvoir les compétences élémentaires des adultes. Les cantons et la Confédération sont invités à s’engager « pour que les adultes puissent acquérir les compétences de base qui leur font défaut et les maintenir. » (LFCo, art. 14 al. 1).
Le Conseil d’Etat a confié à la Direction générale de l’enseignement postobligatoire la mission de mettre en œuvre la LFCo. En 2018, la DGEP a pour objectifs d’établir une vue d’ensemble des offres existantes et leurs participants, de combles les manques en matière d’offres de cours et d’accroître la demande.
Toutefois, le cadre juridique cantonal paraît insuffisant pour mettre en place une politique publique en faveur des compétences de base. En effet, les articles 111 et surtout 115 de la loi vaudoise sur la formation professionnelle (LFPr) inscrivent les cours de langue et de culture générale dans un processus de formation professionnelle. Or l’illettrisme et les qualifications insuffisantes concernent bien sûr des personnes qui travaillent ou entendent suivre une formation professionnelle mais aussi des gens encore éloignés de ces situations. Ainsi seuls 54% des apprenantes et apprenants des cours vaudois de Lire et Ecrire étaient motivés par une raison professionnelle ; 44% y participaient pour des causes privées (Enquête des participants 2015-2016, Lire et Ecrire, conduite sur un échantillon de 382 personnes).
Si le canton n’a que la loi sur la formation professionnelle pour fondement, l’objectif fédéral risque d’être manqué en partie quant à la promotion des compétences de base. Car il s’agit d’apporter un appui public aux gens qui n’ont pas les ressources nécessaires pour accéder au marché de la formation continue. Il faut viser autant l’intégration professionnelle que sociale. Dans le canton, la proportion de personnes faiblement qualifiées est plus importante qu’en moyenne suisse : 11,5% de la population vaudoise dès 30 ans n’a pu suivre l’école obligatoire ou sur une durée de 9 ans seulement, tandis que la proportion est de 8,7% en Suisse.
Rappelons à cet égard la mesure 1.1 du programme de législature 2017-2022, qui entend notamment « encourager le développement de l’accès à la formation tout au long de la vie et l’intégration professionnelle et sociale (validation des acquis de l’expérience, formation continue, cursus adaptés à des publics en réorientation ou réintégration professionnelle, poursuite ou achèvement d’une formation tertiaire). »
La loi fédérale (LFCo) englobe la formation non formelle dans la politique de formation et définit de nouvelles responsabilités fédérales et cantonales. Les financements de la Confédération ne vont plus uniquement aux organismes actifs, dans le domaine de l’illettrisme par exemple, mais transitent aussi par les cantons qui sont en charge de développer des programmes (LFCo, art. 16). L’ordonnance précise à juste titre que « les programmes cantonaux en matière d’encouragement de l’acquisition et du maintien de compétences de base chez l’adulte sont coordonnés avec les mesures prises sur la base d’autres lois spéciales, notamment avec les programmes d’intégration cantonaux (…) » (OFCo, art. 9 al. 3).
Assurer la qualité reste la responsabilité des prestataires de perfectionnement mais la Confédération et les cantons peuvent les soutenir et règlementer afin « d’instaurer la transparence et la comparabilité des cursus et des titres de la formation continue » (LFCo, art. 6 al. 2). Il est possible de promouvoir l’information sur l’offre, la qualification des formateurs, les programmes d’enseignement et les procédures de qualification.
Les signataires de la présente motion prient le Conseil d’Etat d’examiner une base légale afin d’encourager les compétences de base dans le cadre de la formation continue, d’assurer la qualité des prestations – dans le souci de l’intégration professionnelle et de la cohésion sociale.
Pierre Zwahlen