Interpellation

Comme précisé dans la réponse à l’interpellation Valérie Zonca et consorts – Frais illicites des régies: pour une meilleure protection du droit des locataires (22_INT_166), la loi fédérale sur les contrats-cadres de baux à loyer et leur déclaration de force obligatoire (LCBD) permet de déclarer de force obligatoire générale des contrats cadre régionaux comme les RULV et permet même au Conseil Fédéral d’autoriser qu’il soit dérogé dans certains cas aux règles impératives du droit du bail fixées par le CO.

Dans le canton de Vaud, une force obligatoire générale est conférée au contrat-cadre « Dispositions paritaires romandes et règles et usages locatifs du Canton de Vaud » (RULV) par voie d’arrêté du Conseil d’Etat[1], à l’exception de l’article 8 et avec des réserves sur les articles 22, 26, 28 à 30 et 35. En dehors des exceptions mentionnées, le RULV régit donc tous les contrats de bail.

Par voie d’arrêté[2], le Conseil Fédéral approuve ensuite la déclaration cantonale de force obligatoire générale des RULV. Dans l’arrêté, il est précisé que les articles 2, 19, 22 et 35 des RULV peuvent déroger au CO.

Il semble logique que les autres articles ne puissent donc pas déroger aux dispositions impératives du CO et ne prévoir que des mesures plus favorables aux locataires dans le cas de dispositions semi-impératives.

Or, il semble que l’article 9 des RULV «Obligations du locataire» est moins favorable aux locataires que l’art. 259 CO (semi-impératif). En effet, l’art. 259 CO ne met à la charge du locataire que des menus travaux de nettoyage ou de réparation, alors que l’art. 9 RULV met également à leur charge des travaux pour lesquels il est nécessaire de faire appel à un spécialiste ou un maître d’état, tels que le remplacement d’une vitre brisée (lit. b) ou le remplacement des sangles de stores (lit. e).

Le Tribunal cantonal vaudois a cependant jugé[3] que « le coût des menues réparations listées à l’art. 9 RULV doit être supporté par le locataire même si elles doivent être exécutées par un technicien et même si leur coût dépasse 150 fr., dérogeant en cela au caractère semi- impératif de l’art. 259 CO » (cons. 3.2.1.). Le Tribunal cantonal précise également que par la déclaration de force obligatoire générale sur tout le territoire vaudois, « l’art. 9 let. e RULV a acquis la même portée que l’art. 259 CO, auquel il est susceptible de déroger valablement » (cons. 3.4.).

Cette interprétation ne tient pas compte de la nécessité, en plus de la déclaration de force obligatoire, d’obtenir l’autorisation du Conseil Fédéral pour qu’un article puisse valablement déroger au CO. Elle rend par ailleurs l’art. 2 de l’arrêté fédéral caduc, puisque celui-ci a précisément pour but d’indiquer quels articles du RULV peuvent déroger au CO.

Dès lors, je souhaite poser les questions suivantes au Conseil d’Etat :

  • D’après le Conseil d’Etat, l’art. 9 RULV peut-il déroger à l’art. 259 CO ?
  • Dans le cas contraire, quelles mesures le Conseil d’Etat peut-il prévoir pour s’assurer que cette situation soit connue des locataires et éviter ainsi qu’ils soient trompés par l’art. 9 RULV partiellement illégal ?

La présente analyse est largement issue du document : Les règles et usages locatifs du canton de Vaud (RULV) face au contrat-cadre romand et au code des obligations / III. – IV. (Patricia Dietschy- Martenet).[4]

[1]Arrêté 221.317.1 du 27 mai 2020

[2]FF 2020 5585 du 24 juin 2020

[3]TC VD du 27.06.2016 n° 242

[4] Patricia Dietschy- Martenet, Les règles et usages locatifs du canton de Vaud, in François Bohnet et Blaise Carron, 21 séminaire sur le droit du bail, Neuchâtel 2020, n. 8, p. 159-161