Tourisme en montagne: n’étouffons ni les habitant·e·s et la nature!
La mobilité liée au tourisme obstrue les routes du Chablais. Les habitant·e·s en subissent les nuisances, jours après jours. En même temps, le canton se targue de financer le développement d’un tourisme quatre saisons durable, mais qui n’est durable que de nom. Malheureusement, cette stratégie risque de bien de nuire dorénavant toute l’année à l’environnement et à son vivant.
Dans son communiqué de presse du 23 janvier, le Conseil d’Etat met en évidence les bénéfices économiques d’un tel développement, reléguant les arguments écologiques et de durabilité au plan d’alibi. Cela s’appelle vraiment du greenwashing et c’est grave.
Si la plupart des habitant·e·s des Alpes Vaudoises sont dupes des nuisances de cette stratégie touristique avilissante et non partagée, d’autres ont saisi la nature détournée de ce programme et sont très déçu·e·s par le mépris affiché pour la qualité de leur vie et pour la protection de la nature: ils et elles sont scandalisé·e·s par l’usage, en quelque sorte détourné, de l’argent public.
Le tourisme dans les Alpes vaudoises doit s’orienter vers de nouvelles propositions de loisirs moins invasives, moins polluantes et moins nuisibles, réparties sur l’année, ce qui justifie un soutien fort du canton. Les député·e·s qui ont, comme moi, voté en 2022 le crédit de 50 millions de francs pour soutenir ce changement étaient bien naïfs. C’était sans compter l’avidité et l’opportunisme qu’allait exercer cette aubaine sur de nombreux décideurs.
Lors de la soirée publique d’information du même jeudi 23 janvier aux Mosses, on a découvert que la montagne est un terrain de jeu, que malgré le déploiement de nombreuses pistes de VTT, la neige doit être sécurisée avec des canons à neige, que la piscine naturelle est un bienfait pour la biodiversité et que tout cela est indiscutablement écologique.
Oui, la rhétorique écologique était parfaitement maitrisée, à tel point qu’on peut s’interroger sur la sincérité de la collaboration avec la HES-SO/Valais, dont l’étude laissait espérer un apport de réelles nouveautés, comme la notion de «tourisme de partage», en relation avec la population locale, partage vite oublié par les porteurs de projets.
S’il a été vanté que le tourisme vaudois génère quelques 1,6 millards de francs, il n’a pas été précisé comment cette richesse est partagée et pourquoi les deniers publics soutiennent une branche en si bonne santé économique.
Aucune réponse convaincante non plus au sujet du soutien financier de l’Etat à la réfection de la piscine privée d’un hôtel, alors que la piscine municipale doit urgemment être restaurée. Pourtant, Mme la Conseillère d’Etat Isabelle Moret semblait inviter le public à s’approprier la part restante des 50 millions non dépensée. Étrange tout de même que cette commune n’ait pas pensé à la piscine publique… !
Les humains et leurs désirs de bien-être — ou d’enrichissement — continuent donc de régner en maître sur un espace précieux, fragile et vital.
Et si ces milliards générés par le tourisme n’étaient que la partie visible de l’iceberg? Si le bilan négatif sur l’environnement et la santé coûtait au moins autant, qui payera, dans un Etat où les impôts sont revus à la baisse? Devrons-nous voter un nouveau crédit pour réparer les dégâts? Cela pourrait s’avérer rentable, pour certains à court terme. Une catastrophe pour d’autres sur la durée.
(Déclaration personnelle lue lors de la séance du Grand Conseil le 28 janvier 2025)