Face à l’obscurantisme, allumons la lumière
Les tripes qui vrillent. C’est à peu près la sensation que j’ai chaque jour en lisant les nouvelles. Que ce soit dans notre pays ou à travers le monde, le fascisme est là, grandissant et décomplexé. Avec lui, nos droits de femmes*, de minorités, de personnes LGBTIQ+, de personnes vulnérables sont ébranlés, mis en danger, sabotés. Cette situation est très bien résumée par la visionnaire Simone de Beauvoir à travers sa célèbre citation : «N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant.»1
Face à cette réalité, en tant que militant·e, on pourrait trouver la tâche de porter nos valeurs trop dure ou un peu folle. On peut aussi être dans un état de sidération et ne pas savoir comment agir. Et bien, l’une des pistes d’action est, à mon sens, d’utiliser nos outils démocratiques pour faire évoluer notre société et attaquer les paradoxes patriarcaux. C’est ce que les Vert·e·s suisses font en lançant prochainement l’Initiative pour un congé familial au sein d’une large alliance.
Cette initiative populaire propose une répartition paritaire du congé parental de 18 semaines par (co)-parents. Cela permettrait d’offrir un congé parental étendu. Actuellement, les parents ont droit en tout à 16 semaines (14 pour les mères, deux pour les pères). Il est certain que le congé maternité est une victoire de haute lutte des mouvements féministes suisses. Ce fut une avancée indéniable pour toutes les femmes*. Mais c’est une solution qui est perfectible. Tout d’abord parce qu’elle n’offre pas la possibilité d’intégrer pleinement le co-parent dans l’arrivée de l’enfant. Si un congé de deux semaines pour le père 2 est là aussi une avancée (beaucoup trop récente), ça reste totalement insuffisant pour renverser les stéréotypes et répartition de charge mentale que subissent les femmes* à la suite de leur accouchement.
Le retour au travail est aussi loin d’être une panacée! Les difficultés de garde, le jugement des proches, la culpabilité maternelle sont des freins importants à la reprise d’un travail pour les mères*. Pour les pères 2, la difficulté de pouvoir s’impliquer (car aucun temps rémunéré n’est réellement prévu pour le permettre) a un impact sur l’équilibre familial. Or, une paternité impliquée est un facteur de protection de la santé de la famille. Selon certaines études, la probabilité d’un comportement violent de la part des pères peut être corrélée avec un manque d’engagement paternel. Alors qu’un fort engagement paternel diminue la probabilité de séparation ou de divorce et augmente la probabilité d’une réorganisation coopérative du système familial en cas de divorce. L’implication paternelle augmente aussi la probabilité d’une relation durable et stable entre le père et l’enfant après une séparation ou un divorce.
Autant de raisons qui doivent nous pousser à nous engager pour un renforcement des droits des parents en portant cette initiative. Et qui nous permet aussi, en ces temps inquiétant, de «dire à ces messieurs, que c’est bien prétentieux, d’apprendre la vie à celle qui la donne» 3.
1 Claudine Monteil, Simone de Beauvoir et les femmes aujourd’hui, éditions Odile Jacob, Paris, 2011
2 L’initiative accorde la même durée aux parents de même sexe.
3 Parole de la chanson «Dieu est grande» de Youssoupha.
