Lors du Conseil communal du 11 mai 2023, la Municipalité nous a présenté une« charte pour une restauration collective durable» comprenant 14 principes que la Ville souhaite appliquer en lien avec la production de repas pour les structures d’accueil pré et parascolaire.

Si nous félicitons la Municipalité pour l’adoption de nombreux points de cette charte, il est tout de même étonnant qu’elle ait choisi de passer totalement sous silence l’abandon par la Ville du label « Fourchette Verte» sans donner la moindre explication à ce choix alors qu’il s’agit pourtant d’un label reconnu au niveau de la restauration collective.

De plus, plusieurs engagements mentionnés dans cette charte sont clairement insuffisants si on veut vraiment pouvoir parler d’une alimentation durable.

Les faits

En Suisse, 30% des atteintes à l’environnement sont dues à l’alimentation 1. Parmi ce pourcentage, 50% de l’impact environnemental de l’alimentation est dû aux produits d’origine animale, c’est-à-dire la viande, les produits laitiers et les œufs 2

Un repas carné émet entre 5 à 20 fois plus de gaz à effet de serre qu’un repas végétal 3• Et c’est sans compter l’impact de l’élevage sur la pollution de l’air, des sols, des eaux et des enjeux liés à la déforestation.

Dans le rapport 2022 du GIEC sur les moyens de limiter le réchauffement climatique, les experts affirment que« le plus grand potentiel de changement proviendrait du passage à des régimes alimentaire végétaux. » 4. L’ONU affirme la même chose 5

On comprend donc qu’un des moyens les plus simples à mettre en œuvre afin de diminuer massivement notre impact environnemental est de simplement changer nos habitudes alimentaires.

En 2020, la Municipalité de Vevey a déclaré l’urgence climatique, suivie peu après par le Conseil communal. Par cette mesure, la Municipalité s’est engagée notamment à« choisir les alternatives préservant le climat pour tout projet, achat ou dépense ».

Dans le Plan climat publié en septembre 2022, elle s’engage également à mettre en œuvre la mesure suivante : « C.A.3 – Exiger une alimentation de saison, locale, biologique et d’origine végétale dans les établissements de restauration collective dépendant de la Commune» avec pour objectif d’atteindre 60% de ce but à l’horizon 2026 et 100% en 2032 6

Notons d’ailleurs qu’aucune mention de cet objectif ne figure dans la charte éditée par la Ville, ce qui est pour le moins étonnant.

Les demandes

Le présent postulat demande donc à la Municipalité d’agir conformément à ses promesses et aux engagements pris dans le Plan climat et de bien vouloir étudier l’opportunité:

  • de proposer dès maintenant un maximum d’un repas carné par semaine (viande ou poisson) dans l’ensemble des structures de restauration collective pré et parascolaire gérées par la ville ;
  • de n’acheter que de la viande bio, d’origine suisse et issue d’élevages en plein air et des poissons d’origine suisse afin d’éviter toute forme de pêche destructrice 7;
  • de proposer uniquement des produits végétariens (voir totalement végétaux) dans le cadre des événements officiels organisés par la ville, comme l’ont, par exemple, déjà décidé les villes d’Amsterdam, d’Helsinki ou encore l’un des arrondissement de Londres 8;
  • d’exiger des événements publics ayant lieu sur le territoire communal qu’ils proposent systématiquement au moins une option végétarienne (voir totalement végétale).

Les avantages

Ces propositions auraient notamment les avantages suivants :

  • Application des recommandations de santé du label « Fourchette Verte » et de la Société Suisse de Nutrition: le label exige pour des raisons d’équilibre alimentaire que « sur les 14 repas de la semaine, maximum trois repas contiennent de la viande/volaille» et ce, tant pour les enfants que pour les adultes 9• La Société Suisse de Nutrition recommande quant à elle un maximum de deux à trois repas carnés sur les 14 repas de la semaine 10. Il est par conséquent scandaleux que la ville ne respecte pas ces recommandations nutritionnelles issues d’organisme reconnus et qu’elle continue de proposer deux fois trop de repas carnés et mette en danger la santé de nos enfants.
  • Amélioration de l’équilibre alimentaire des enfants : contrairement à la croyance populaire, ce sont les enfants issus des familles les plus modestes qui consomment le plus de produits carnés, souvent issus de produits industriels de mauvaise qualité nutritionnelle 11.
  • Facilité de mise en œuvre : la ville propose déjà une offre végétarienne deux fois par semaine, le changement demandé se contente de développer une pratique déjà existante, éprouvée et ne posant aucun problème.
  • Baisse de 25% des coûts liés aux achats alimentaires : ces économies permettraient notamment d’investir dans des aliments de meilleure qualité ou de miser sur une plus grande part de produits locaux, de saison, bio ou labellisés 12 13.
  • Réduction drastique de l’impact environnemental de la ville en lien avec son offre alimentaire, ce qui permettrait à la ville de faire office de modèle en Suisse, conformément à ses engagements en faveur de la lutte contre le changement climatique 14.
  • Application des recommandations du GIEC et de l’ONU qui considèrent cette mesure comme la plus simple à mettre en œuvre afin de lutter contre le réchauffement climatique.

Au vu de ce qui précède, nous vous encourageons vivement à soutenir ce postulat qui permettra à la ville de Vevey à la fois de respecter ses engagements du Plan climat, de diminuer son empreinte carbone, d’améliorer la santé de nos enfants et de rejoindre le réseau des villes pionnières en matière de végétalisation de l’alimentation.

En leur nom personnel

Mickael Bertschy (Vevey Libre)
Valérie Zonca (Les Vert-e-s)
Fabien Truffer (Vert’libéraux)
Marion Houriet (Parti socialiste)

5 juin 2023

 

1 Office Fédéral de l’Environnement, Impact environnemental de la consommation et de la production suisses (Synthèse), p. 11.
2 Esu-Services, 2015.
3 Assiettesvégétales.org, « Comprendre l’impact d’une alimentation plus végétale sur l’environnement».
4 GIEC, Climate Change 2022 Mitigation of Climate Change, TS-98, chap. TS. 5.8, ligne 19.
5 UNEP.org, « fmproved climate action on food systems can deliver 20 percent of global emissions reductions needed by 2050 ».
6 Ville de Vevey, Plan Climat (version synthétique), pages 68 et 69.
7 – Bloomassociation.org, « Label MSC: la belle arnaque ». -LeParisfr, « Le label MSC pour une pêche durable est-il une «imposture» ? ».
8 – Dutchnews.nl, « Amsterdam Council Switches to 100% Vegetarian Catering ». Neopolitico.com, « Finland’s capital to go Vegetarian to reduce carbon footprint ». Metro.co.uk, « Council bans meat to tackle climate crisis ».
9 Fourchette Verte, Brochure « Affiliation Junior» p. 3 et Brochure« Affiliation Adulte » p. 3.
10 Société Suisse de Nutrition, La pyramide alimentaire suisse Recommandations alimentaires pour adultes, alliant plaisir et équilibre, p. 14.
11 Centre d’Étude et de Prospective, ministère del’ Agriculture, de I’ Agroalimentaire et de la Forêt, Les différences sociales en matière dalimentation, in Analyse, n° 64, octobre 2013.
12 – Observatoire de la restauration collective bio et durable, Résultats de l’enqte 2020, p. 7. -AVF-Greenpeace, Option végétarienne dans les cantines la réalité du terrain, p. 18: « 91 % des structures interrogées proposant déjà une option végétarienne tous les jours disent que le menu végétarien coûte moins cher, le même prix, et/ou permet d’acheter des aliments de meilleure qualité. ».
13 Pour illustrer, en prenant les données fournies par le« Rapport d’analyse des pratiques d’achats alimentaires» de la société Beelong, à l’échelle de la garderie« Les Marionnettes» uniquement, cela représenterait une économie d’environ CHF 20’000.- /an.On imagine alors aisément l’impact que cela pourrait avoir à l’échelle de l’ensemble de la commune et qui doit se compter en centaines de milliers de francs.
14 Pour reprendre l’exemple de la garderie« Les Marionnettes», il s’agirait d’une réduction de 8 tonnes de CO2 par année uniquement pour cette garderie. Cela correspond à un trajet de 26’000 km en voiture, soit 2/3 d’un tour du globe. À nouveau, ces chiffres sont à reporter à l’ensemble des structures gérées par la commune.