Postulat

Le chauffage et la production d’eau chaude des bâtiments représentent une part importante de la consommation d’énergie du pays. S’il est bien entendu prioritaire de concevoir un bâtiment parfaitement isolé thermiquement, il est aussi nécessaire de prévoir un système de chauffage adéquat et environnementalement responsable. Celui-ci devra à terme se passer de toutes énergies fossiles pour viser une neutralité carbone de la Ville en 2030[1]. La Loi vaudoise sur l’Energie (LEn) requiert déjà 30% d’énergie renouvelable pour les nouvelles constructions, en laissant le choix de technologie (pompe à chaleur, solaire, bois, chauffage à distance renouvelable) suivant le contexte, mais ce 30% ne concerne que la couverture des besoins d’eau chaude sanitaire, et pas ceux du chauffage.
L’énergie solaire thermique (= faite par des capteurs solaires thermiques et non pas photovoltaïques), considérée dans son ensemble, est l’énergie renouvelable la plus respectueuse de l’environnement pour ce qui est de la production de chaleur nécessaire à nos bâtiments et autres services. Les installations sont en effet composées de matières premières simples et peu problématiques, de longue durée de vie, qui peuvent être facilement réparées, réutilisées, réaffectées ou en dernier recours, recyclée (de l’acier, de l’acier chromé, du cuivre, du bois, du verre, de l’aluminium et du matériel d’isolation sont utilisés). Le fluide utilisé est local, écologique, et incroyablement bon marché : l’eau du robinet.
Que ce soit sur de nouveaux immeubles, pour lesquels le mode de chauffage peut être entièrement conçu selon cette logique, ou pour des immeubles existants subissant des rénovations, nous pensons que le solaire thermique devrait être la règle, et non l’exception. Dans bien des cas, une bonne partie ou la totalité des besoins en chaleur peuvent être récoltés sur les toits et façades, via des appareils et équipements bon marché, techniquement simples, et maitrisés. Les installations solaires thermiques peuvent même être auto-cosntruites. En effet, grâce à la mise en œuvre de la stratégie énergétique fédérale de rénovation des bâtiments (programme bâtiments), les besoins de chaleur, que ce soit pour le chauffage ou l’eau chaude sanitaire, vont drastiquement baisser. C’est un changement de paradigme que l’on observe déjà dans l’habitat individuel (maison passive, Minergie P, etc). Dans ces conditions, le recours au solaire thermique est la solution la plus écologique pour couvrir une partie majeure du chauffage et de l’eau chaude sanitaire, avec des surfaces de capteurs raisonnables.
Concrètement cela peut se faire via des accumulateurs qui peuvent contenir des milliers de litres d’eau. De tels accumulateurs peuvent être disséminés dans la ville et communalisés par quartier ou groupe d’immeubles et répondre, de la sorte, en grande partie, à la demande en chaleur des nouveaux bâtiments ou des bâtiments rénovés (vu leurs besoins en chaleur réduits). Ces accumulateurs peuvent en effet stocker de l’été à l’hiver une grande partie de l’énergie nécessaire. Pour compléter le manque en hiver, une source de chaleur annexe (comme le CAD) sera nécessaire.
Pourtant, la stratégie municipale actuelle au niveau urbain est d’étendre le réseau de chauffage à distance (CAD), actuellement alimenté par la combustion des déchets (TRIDEL), avec un appoint au gaz ou mazout lors des pics de demande. Ces sources de chaleur n’ont pas d’avenir, car elles ne sont pas conformes à une politique climatique répondant à l’accord de Paris. Ces apports du CAD doivent se décarboniser. Pour ce faire, il est souhaitable de combiner un raccordement au CAD avec une source locale de chaleur solaire. Dans ce même but, l’étude de la faisabilité technique d’un réseau dans lequel des immeubles, des particuliers, des coopératives, des industries pourraient réinjecter leur surproduction de chaleur solaire est aussi une solution à étudier.
Via cette stratégie, le solaire thermique pourra assurer une partie majeure de l’approvisionnement en chaleur des bâtiments tout au long de l’année. La mise en œuvre à grande échelle de ce concept dans le secteur suisse de la construction permettra ainsi de contribuer de manière conséquente à un tournant énergétique fonctionnel et local.
Ce postulat demande à la Municipalité d’étudier l’opportunité :

  • d’évaluer la faisabilité technique et économique de recourir au solaire thermique selon le concept présenté pour le chauffage et l’eau chaude des bâtiments lausannois et d’en déterminer le rapport coût-utilité,
  • de déterminer le potentiel le plus facilement exploitable pour supprimer toute énergie fossile dans le CAD,
  • d’en organiser une mise en œuvre ambitieuse dans le cadre de sa politique énergétique et urbanistique.

Marie-Thérèse Sangra, Benjamin Rudaz, Valery Beaud, Daniel Dubas, Karine Roch, Jean-Michel Bringolf


[1] Préavis 2019/30 « Stratégie municipale en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre et d’adaptation aux changements climatiques