Que fait-on pour garder nos policières et policiers, et les encourager ?
Interpellation
Notre Police municipale est souvent sous les feux des projecteurs, générant des réactions fortes, tant de défiance que de soutien. Et pour cause, détenant le monopole de la force publique, la Police Municipale est l’objet d’attentes élevées de la population, et doit souvent jongler entre des demandes pour d’avantages de fermeté et de présence, et d’autres pour plus de liberté et de souplesse. Une chose est sûre, les policières et policiers doivent faire preuve d’exemplarité et avoir une attitude irréprochable et proportionnée dans leurs interventions au vu de leur statut et de leurs fonctions.
De plus, personne ne saurait remettre en cause le fait que les conditions de travail du corps de police (heures d’affilées, heures supplémentaires, pressions politiques et sociales, travail de nuit et le week-end, tensions avec les usagères et usagers, etc.) sont parmi les plus contraignantes qu’un corps de métier doit assumer, tant d’un point de vue psychologique que physique. Ces contraintes demandent une détermination supplémentaire de la part des employé-e-s concerné-e-s, mais aussi une capacité à garder son sang froid et à prendre sur soi, notamment dans le cadre de provocations ou de situation génératrices de stress.
De plus les demandes de travail supplémentaire, de couverture d’événements en week-end ou en soirée ne vont cesser d’augmenter ces prochaines années, notamment avec l’ascension probable du Lausanne-Sports en Super league, le retour à la Pontaise du Stade Lausanne Ouchy, la continuation des manifestations dont Lausanne est un des grands centres, ou encore avec les matchs du Lausanne Hockey Club qui ne vont pas diminuer. En outre, la clef de répartition en «apport» de personnel pour de tels événements, entre les différentes polices du canton (et parfois au-delà) semble être très exigeante pour la police Municipale lausannoise, ce qui demande des efforts d’autant plus important au corps de police. Toutes ces occasions constitue pour le corps de police des heures supplémentaires, sous haute tension, hors des horaires normaux et pendant lesquels il ne peut pas réaliser son travail de proximité ou de sécurisation ordinaire de l’espace public.
L’ensemble de ces éléments démontre que les contraintes sur les employé-e-s du corps de police sont, en principe, plus grandes que celle d’un-e employé-e «ordinaire» et qu’il y a donc lieu d’assurer une certaine reconnaissance y relative, si l’on ne veut pas perdre les bons éléments. Celle-ci peut revêtir plusieurs formes, soit dans l’aménagement des heures de travail, de repos, de salaire, sous forme d’indemnité, etc.
Or il semblerait que la Police Municipale ait un déficit dans cette «compensation» nécessaire par rapport aux autres polices (municipales ou cantonales) alentours. Cela peut notamment impliquer une diminution de la motivation, et donc de la performance, mais peut aussi avoir tendance à faire partir les policières et policiers relativement rapidement après leur formation, vers des villes ou cantons où les conditions (horaires, salariales ou autres) sont plus avantageuses, où elles et ils pourront faire un travail de proximité bien plus paisible qu’en> Ville de Lausanne. En extrapolant à l’extrême, cela peut revenir à appliquer la «théorie des mauvais risques», soit qu’en réduisant la qualité de nos contre-prestations, nous ne conservions à Lausanne que des employé-e-s moins expérimenté-e-s, moins motivé-e-s, ou de moindre qualité. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, car il y a un fort sentiment d’appartenance à la Ville de Lausanne, une diversité du travail effectué et une volonté de tout donner pour notre ville, mais nous ne pouvons pas tenter le diable et tirer sur la corde jusqu’à ce qu’elle ne lâche.
Au final, s’il y a moins d’effectifs (à cause de ces départs) et plus d’engagements (matchs de sport, manifestations, etc), c’est la sécurité de toutes et tous (policières et policiers comme public) qui est en jeu.
Il est d’ailleurs pas anodin qu’un nombre important de jeunes policières et policiers quitte la Ville pour d’autres corps où elles et ils peuvent par exemple profiter d’un horaire de travail de bureau, faire un vrai travail de proximité ou bénéficier de prestations salariales bien meilleures.
A titre d’exemple, les gendarmes vaudois ont reçu, pour l’effort consenti pendant l’été 2019, soit pendant l’opération dite «Concorde» (notamment pour avoir assumé un service plus élevé pendant la Fête des Vignerons), une prime de CHF 750 afin de les indemniser. Alors que la police lausannoise a fourni un effort au moins aussi considérable pendant cette période, aucune indemnité spécifique ne semble avoir été octroyée à ses employé-e-s.
Il convient donc que Lausanne s’assure de ne pas perdre ses bons éléments, dans la police comme ailleurs, mais le corps de police doit faire face à une situation que d’autres ne vivent pas, soit celle de Ville centre, de Ville de la Fête, de Ville des manifestations, etc… qui implique depuis toujours son lot de problématique liées à la sécurité, comme on a pu le voir avec «les nuits lausannoises» ou le deal de rue il y a moins longtemps.
Ces particularités nous amènent à poser les questions suivantes à la Municipalité :
- Quelle est la durée moyenne d’engagement d’une policière ou d’un policier après avoir achevé sa formation à la Ville de Lausanne ?
- La Municipalité constate-t-elle des départs rapides au sein de sa police chez les jeunes ou tout autre catégorie d’employé-e-s en raison des conditions de travail (horaires, salaire, etc) ?
- Quel salaire obtient une policière ou un policier lausannois-e en sortant de sa formation à la Ville de Lausanne ?
a. Quel est, en comparaison, le salaire qu’obtient une policière ou un policier dans la même situation dans les dix plus grandes villes de Suisse ?
b. Idem en comparaison avec les autres villes du Canton de Vaud ?
c. Idem en comparaison avec les gendarmerie cantonales romandes ? - Quels sont les horaires moyens des policières et policiers lausannois-es ?
- Les membres du corps de police effectuant des horaires soutenus, continus, ou hors de l’usuel sont-ils indemnisés d’une quelconque manière (financièrement ou en temps notamment) ?
- L’ensemble du corps de police reçoit-il des indemnités pour des engagements particulièrement importants ?
- Quelle est la clef de répartition en effectif entre les différentes polices municipales vaudoise, ainsi qu’avec la gendarmerie vaudoise, pour les grands événements se déroulant à Lausanne (matchs de foot, manifestations, etc) et hors de Lausanne (idem, mais aussi Fête des vignerons, etc) ?
- Qu’en est-il à Lausanne des possibilités de formations supplémentaires ou continues à disposition des policières et policiers lausannois-es ? Par exemple sur des thématiques comme la gestion non-violente des conflits, l’intelligence collective, les divers
addictions ou les questions d’égalité, mais aussi vis à vis des nouveaux enjeux actuels (cybersécurité, harcèlement en ligne, nouvelles formes de mobilisations sociales,etc.) ? - La Municipalité de Lausanne n’estime-t-elle pas que pour conserver les meilleurs policiers possibles il convient d’offrir une meilleure possibilité d’aménager les conditions de travails (horaires, temps partiels, etc.), tout du moins de compenser financièrement cette implication ?