Interpellation urgente

Mercredi soir 6 juin 2018, nous apprenions, par voie de presse, la disparition du quotidien romand Le Matin dans sa version imprimée. Les employés ont été, eux, informés le lendemain matin, par communiqué interne. Ce communiqué a été quasiment repris mot pour mot pour devenir un « article » dans le 20 minutes, quotidien gratuit concurrent appartenant pourtant au même éditeur, soit Tamedia.
Le communiqué indique que le journal va continuer à subsister en ligne, avec 10 ou 15 collaborateurs seulement. Cela sous-entend une quarantaine de licenciement au moins. En parallèle, Tamedia a expliqué qu’il allait « promouvoir » différents journalistes en qualité « d’experts », ceci dans le cadre d’un projet appelé « perspectives de carrières pour les journalistes ».
La disparition du quotidien romand Le Matin dans sa version imprimée marque la mort du journal que nous avons tous lu régulièrement, à une table de café, chez le médecin, ou en attendant un train. Mais une chose est sûre, c’est que Le Matin est lu, par beaucoup de monde, et pas uniquement sur internet. En effet, c’est un journal populaire, qui parle notamment à une tranche de la population qui n’est pas habituée à rechercher l’informations sur internet et qui risque donc, dès le 22 juillet 2018, date de la dernière édition papier, de voir disparaître une des désormais rares sources d’information à sa disposition.
La Municipalité de Lausanne a déjà eu l’occasion à plusieurs reprises de faire part de ses craintes pour le futur de la presse romande, notamment à Tamedia lors de la restructuration de 24 Heures et de la Tribune de Genève, ou encore lors des débats sur l’initiative No Billag. Malgré cette dernière victoire politique, et les inquiétudes exprimées régulièrement, la situation se dégrade de jour en jour relativement à la diversité de la presse romande. Tamedia en particulier semble faire la sourde oreille face aux volontés politiques et populaires. Dans ce paysage sombre, existe-t-il encore une marge de manœuvre pour préserver la diversité de la presse en Suisse romande, ce « chien de garde de la démocratie » comme le nomme la CEDH ? Ou doit-on se plier aux décisions d’un grand groupe de presse sans broncher jusqu’à ce qu’il ne reste plus que sur le marché le seul 20 minutes, fierté de Tamedia puisqu’il s’agit du seul titre qui réalise des bénéfices ?
La Ville de Lausanne, comme ville hôte du siège de Tamedia comme de Ringier Romandie, doit pouvoir jouer un rôle pour préserver cette diversité de la presse qui nous est chère. C’est pourquoi nous posons les questions suivantes à la Municipalité :
La Municipalité a-t-elle été informée de la situation avant la décision définitive de Tamedia ?
La Municipalité est-elle en contact avec les dirigeants de Tamedia, la société des rédacteurs, ou le Canton dans le cadre de ces négociations importantes ?
Quel rôle entend jouer la Municipalité dans les négociations pour préserver la version papier du Matin, ou pour assurer un plan social adéquat aux collaborateurs dont le licenciement a été annoncé ?
Quels ont été les retours de Tamedia sur la lettre ouverte de neufs syndics de villes vaudoises (dont Lausanne) du 27 septembre 2016?
Les discussions sont-elles possibles, à terme, avec Tamedia, afin d’arriver à un résultat permettant de préserver la diversité de la presse en Suisse romande ?
Qu’entend faire la Municipalité pour empêcher la situation de la presse romande de se dégrader d’avantage ?
Xavier Company