Valéry Beaud

Interpellation – Qu’en est-il du stationnement automobile aux Plaines-du-Loup ?

Le préavis d’intention et rapport-préavis n° 2007/19 « Projet Métamorphose » (avril 2007) posait les premières bases de l’écoquartier des Plaines-du-Loup. Il présentait notamment les 13 principes de développement durable pour un écoquartier à Lausanne, dont des « transports durables », proposant entre autres de « déconditionner le réflexe de la voiture particulière en prenant des mesures dissuasives à l’égard de son utilisation et d’encouragement vis-à-vis des modes de transports publics et doux ».

Rapidement, le ratio de places de stationnement envisagé a été fixé à 0.5 place par 100 m2 de surface brute de plancher pour le logement et 0.4 places par 100 m2 pour les activités économiques, base sur laquelle a été élaboré le Plan directeur localisé (PDL) en vue de la réalisation d’un écoquartier aux Plaines-du-Loup (décembre 2013), qui a été amendé par le Conseil communal et prévoyait parmi les principes retenus de « limiter le stationnement voiture ».

Les objectifs en termes de stationnement ont ensuite été retranscrits dans le Plan partiel d’affectation (PPA) « Ecoquartier des Plaines-du-Loup – Etape 1 », entré en vigueur le 2 juin 2017, qui prévoit à son article 8 que « le nombre total de places de stationnement pour véhicules est limité à 700. Un maximum de 30 places de stationnement exclusivement destinées à un service d’autopartage peut être réalisé en sus ». Pour mémoire, cette première étape accueillera environ 1’150 logements et 30’000 m2 de surfaces d’activités.

Par la suite, le préavis n° 2020/18 « Plaines-du-Loup – premier plan partiel d’affectation – pièces urbaines A, B et C » du 28 mai 2020, adopté par le Conseil communal le 8 septembre 2020, comprenait notamment l’octroi d’un « droit distinct et permanent de superficie n° 21’007, grevant environ 3’596 m2 de la parcelle n° 20’824 en faveur de la société simple du parking centralisé, pour la construction d’un parking de 700 places, 10 places pour véhicules en autopartage et 100 places deux-roues motorisés ». Celui-ci précisait notamment les parts dans la société simple et la clé de répartition des coûts, qui sont les suivants :

Si jusqu’en 2020, il était encore estimé que le ratio de 0.5 place de stationnement par 100 m2 de surface brute de plancher ou par logement était suffisamment ambitieux, force est de constater aujourd’hui que les comportements en termes de mobilité évoluent rapidement et qu’un nombre toujours plus important de lausannois n’ont pas de voiture personnelle.

Selon les dires de certains acteurs impliqués dans le développement de l’écoquartier des Plaines-du-Loup, il semblerait d’ailleurs que le parking en ouvrage de 700 places soit aujourd’hui surdimensionné. Les nombreuses annonces de location trouvées ce jour sur internet confirment dans tous les cas que les places de stationnement peinent à trouver preneur.

Si cette nouvelle est en soit plutôt réjouissante, elle mérite toutefois d’être analysée avec attention, afin d’éviter deux biais dommageables pour la politique de mobilité de la commune de Lausanne.

Premièrement, il semblerait que des habitants et usagers de l’écoquartier des Plaines-du-Loup vont actuellement stationner leur voiture sur le parking « longue durée » du Vélodrome, dont l’abonnement mensuel ne coûte que Fr. 80.- par mois, largement meilleur marché qu’au sein du parking en ouvrage de l’écoquartier, dont les prix semblent varier entre Fr. 150.- et 190.- par mois selon les annonces trouvées sur internet. Cette délocalisation du stationnement des habitants et usagers ne serait pas conforme aux objectifs du projet et pourrait représenter un risque de report de stationnement dans les quartiers environnants au moment de la suppression à venir du parking du Vélodrome si le parking en ouvrage des Plaines-du-Loup devait être complet à cette échéance.

Deuxièmement, si le parking en ouvrage devait effectivement être surdimensionné pour la première étape de l’écoquartier des Plaines-du-Loup, il faudrait s’assurer que les places vides ne soient pas mises à disposition d’autres usagers que ceux à qui était destiné le parking, particulièrement à des pendulaires à la recherche d’une place de stationnement pour contourner la politique de mobilité de la Ville de Lausanne. La découverte de nombreuses places en location sur internet semble pourtant montrer le contraire, et que les propriétaires du parking cherchent avant tout à rentabiliser au plus vite leur investissement.

Ces différents éléments étant exposés, nous souhaitons poser les questions suivantes à la Municipalité :

1) Comment la vente ou la mise en location des places de stationnement du parking en ouvrage des Plaines-du-Loup est-elle effectuée : par la société simple du parking centralisé ou par chacun des copropriétaires ? Comment la Ville de Lausanne en est-elle informée ? Quel est son « droit de regard » ?

2) La Municipalité peut-elle donner au Conseil communal un état des lieux sur le taux de remplissage du parking en ouvrage des Plaines-du-Loup au regard du nombre d’habitants et emplois actuels, particulièrement le nombre d’habitants de l’écoquartier, le nombre d’usagers de l’écoquartier et le nombre d’autres utilisateurs (habitants des quartiers environnants, travailleurs des quartiers environnants, pendulaires de plus longue distance, etc.) ?

3) La Municipalité est-elle au courant que des habitants et usagers de l’écoquartier des Plaines-du-Loup possédant une voiture ne stationnent pas leur véhicule dans le parking en ouvrage qui leur est destiné, mais sur le parking « longue durée » du Vélodrome ?

4) Existe-t-il actuellement des critères d’attribution pour les abonnements du parking « longue durée » du Vélodrome, comme il en existe pour d’autres parkings comme les P+R ? Si non, pourquoi ? La Municipalité dispose-t-elle des adresses des détenteurs d’un abonnement ?

5) Pour éviter le report de stationnement mentionné auparavant, la Municipalité pourrait-elle supprimer au plus vite le parking « longue durée » du Vélodrome ou en tous cas le principe d’un abonnement mensuel moins cher que le parking en ouvrage de l’écoquartier ? Si non, comment la Municipalité compte-t-elle faire pour éviter ce report de stationnement ?

6) Si le parking en ouvrage devait effectivement être surdimensionné, comment la Municipalité compte-t-elle empêcher que des places ne soient vendues ou louées à des personnes qui n’habitent et ne travaillent pas dans l’écoquartier, voire éventuellement qui habitent à proximité immédiate de l’écoquartier ?

7) Pour les places qui seraient malheureusement déjà louées à des personnes qui n’habitent et ne travaillent pas dans l’écoquartier, comment la Municipalité compte-t-elle s’assurer que la durée des baux est suffisamment courte pour qu’ils puissent être résiliés au moment de l’arrivée des habitants et usagers de la 2e étape de l’écoquartier des Plaines-du-Loup ?

8) Si le parking en ouvrage devait effectivement être surdimensionné, la Municipalité ne devrait-elle pas reprendre l’ensemble des places excédentaires pour les mettre à disposition de la deuxième étape de l’écoquartier des Plaines-du-Loup, en réduisant d’autant le dimensionnement du stationnement de cette étape ?

9) D’ailleurs, au vu des évolutions rapides des comportements en termes de mobilité, du Plan climat et du Plan directeur communal (PDCom), quel ratio de stationnement la Municipalité compte-t-elle appliquer pour la 2e étape de l’écoquartier des Plaines-du-Loup, par exemple se rapprocher de 0.2 place de stationnement par 100 m2 de surface brute de plancher ?

10) La Municipalité a-t-elle prévu de supprimer les places de stationnement situées sur le domaine public le long du Chemin des Bossons, afin d’améliorer la qualité des espaces publics du quartier, en cohérence avec ceux de l’écoquartier ? Si non, les places de stationnement excédentaires du parking en ouvrage ne pourraient-elle pas servir à compenser une partie de la suppression des places situées sur le Chemin des Bossons ?

11) Sur la base de l’ensemble des éléments présentés, la Municipalité n’estime-t-elle pas que le parking en ouvrage aurait dû rester en main de la commune, afin de conserver une maîtrise du stationnement et plus généralement de respecter la politique de mobilité de la Ville de Lausanne ? Compte-t-elle en tirer des enseignements pour les prochaines étapes de l’écoquartier des Plaines-du-Loup ?

 

Valéry Beaud

Alexandra Gerber, Anne Berguerand