Pour une expérience pilote d’un revenu de base inconditionnel
Postulat demandant une étude sur la faisabilité et l’opportunité d’une expérience pilote dans la perspective d’un revenu de base inconditionnel (RBI).
I. Le principe du RBI
Le Revenu de base inconditionnel (RBI) est une somme d’argent suffisante pour vivre, donnée à chaque personne, chaque mois sans condition ni contrepartie. Il reconnaît à l’individu sa qualité pour lui-même, sans lui imposer la condition de l’emploi, qu’il découple du travail. Le RBI vise l’éradication de la misère, la dignité humaine et la liberté de toutes et tous.
Notre regretté Laurent Rebeaud en était un fervent défenseur. Je monte aujourd’hui à la tribune pour défendre son postulat avec amitié, mais surtout avec conviction. Il est utile de rappeler ici qu’il pensait sa proposition comme un opportunité unique d’étudier une amélioration de notre système social plutôt que pour positionner Lausanne dans débat sur le revenu de base, bien que nous nous trouvions en pleine campagne nationale à ce sujet.
II. Son application
Le principe du RBI est en effet soumis à la votation populaire le 5 juin prochain. Deux grandes peurs sont régulièrement évoquées comme argument contre le RBI :
· nous allons créer une société de rentier, les gens ne vont plus rien faire !
· le RBI va faire disparaître tout le système des assurances sociales !
Les défenseurs du RBI pensent au contraire qu’un revenu de base propose un socle social solide et sécurisant – en opposition au filet social fragile que l’on connaît aujourd’hui – et que la liberté du RBI pousse au contraire à l’activité, à l’insertion et à l’innovation. De plus, il valorise et soutien le travail « gratuit », comme le bénévolat.
Un récent sondage a d’ailleurs montré que seuls 2% des Suisses arrêteraient de travailler avec un RBI, alors que, par exemple, 22% deviendraient entrepreneurs et 54% amélioreraient leur formation.
Mais cela n’est qu’un sondage et dans les faits, ni les opposants ni les défenseurs d’un RBI suisse ne peuvent prédire ce qu’une telle application donnerait en Suisse.
Ce que nous connaissons par contre, ce sont les résultats des différents testes et essais de diverses formes de revenu de base ailleurs sur la planète. De telles expérimentations ont eu lieu en Alaska, en Namibie, en Inde, au Canada. À chaque fois, les mêmes résultats encourageant ont été observés : stimulation de l’entreprenariat, baisse de la criminalité, amélioration générale de la santé et particulièrement de la santé au travail, réduction des inégalités financières entre les femmes et les hommes, augmentation du niveau de formation.
Ça donne envie non ?
III. Ce qu’on pourrait essayer à Lausanne
Ce que propose le postulat dont nous parlons ici, c’est de mener une expérimentation limitée autour du RBI dans le contexte suisse, à Lausanne, afin de voir si le fonctionnement de notre société permettrait d’aussi belles retombées.
Ce que notre collègue Laurent Rebeaud avait envisagé, c’est d’étudier l’effet qu’un revenu de base aurait sur un échantillon de population qui reçoit déjà de l’argent de l’Etat. Pour expliquer cette proposition, il relayait toujours les frustrations de sa sœur, assistante sociale, qui passe plus de temps à surveiller les personnes dont elle est sensée aider à la réinsertion, plutôt que de les aider effectivement.
L’idée est donc de trouver un système social plus simple, qui pousse à travailler plutôt que seulement chercher un salaire au moins aussi important que les prestations sociales reçue, avec un Etat moins intrusif et la liberté d’entreprendre garantie.
Il s’agirait dès lors de voir quelles sont les conditions qui soutiennent ou au contraire découragent les efforts des personnes bénéficiant d’aides sociales dans leur recherche d’activité rémunérée. Nous ne proposons donc pas de d’instaurer un RBI pour toutes les Lausannois et tous les Lausannois, mais de s’appuyer sur ce qui existe déjà à Lausanne – et donc ne coûterait rien de plus – c’est à dire les compétences existantes à l’Université de Lausanne et des aides sociales en place, pour essayer d’améliorer notre système en étudiant un fonctionnement différent.
Lausanne ne serait pas seule à se montrer curieuse d’améliorer la qualité de son système. La ville d’Utrecht aux Pays-Bas, quatrième ville du pays avec un peu plus de 300’000 habitants, a en effet entrepris des démarches pour faire sa propre étude dans la perspective d’un revenu de base.
IV. Promesses d’une telle étude
Si les peurs des opposants au RBI se confirment, notre étude lausannoise réglera, du moins pour la Suisse, la question du RBI. Si au contraire, les résultats montrent un système offrant une meilleure sécurité sociale, avec plus d’efficacité dans la réinsertion et de liberté pour les citoyennes et citoyens, nous aurons permis de faire avancer la Suisse vers une réforme sociale au moins aussi importante et bénéfique que l’introduction de l’AVS, qui est déjà une sorte de RBI.
C’est pour cela que les Verts vous invitent vivement à renvoyer ce postulat à la Municipalité.
Léonore Porchet, 12 avril 2016