Postulat

Pour des rentes de droit distinct et permanent de superficie (DDP) dépendantes de la qualité sociale, écologique et économique des projets développés

Grâce à une politique foncière historiquement active, la Commune de Lausanne a la chance d’être propriétaire de très nombreux terrains, notamment sur des sites stratégiques de développement de l’agglomération. Elle poursuit d’ailleurs toujours et à juste titre cette politique, comme illustré récemment par l’augmentation de CHF 30 millions du crédit d’acquisition d’immeubles disponible jusqu’au 31 décembre 2021 (préavis n° 2020 / 37).

Outre la nécessité de couvrir les besoins en infrastructures d’utilité publique, cette maîtrise du sol est un élément déterminant pour assurer le développement de projet de haute qualité en cohérence avec les politiques publiques communales et pour garantir une mixité sociale pérenne grâce à un parc suffisant de logements à loyer abordable.

La Commune de Lausanne reste généralement propriétaire de la totalité de ses terrains et les met à disposition d’investisseurs par le biais de droit distinct et permanent de superficie (DDP). Les DDP octroyés comportent en principe une redevance annuelle de 5% de la valeur du terrain et une durée de 90 ans.

La récente expérience de l’écoquartier des Plaines-du-Loup est particulièrement intéressante dans l’analyse de la pratique lausannoise des DDP (voir préavis 2019/36 et 2020/18). Les contrats de DDP ont notamment permis d’intégrer plusieurs exigences importantes qui s’appliquent ainsià l’ensemble des projets : contrôle des loyers des logements à loyers abordables et des surfaces d’activités, conditions d’occupation des logements à loyers abordables, fourniture exclusivement en énergies de sources renouvelables de provenance régionale, suivi et analyse des consommations d’énergies, règles d’aménagement et d’entretien des espaces extérieurs, lutte contre le travail clandestin et toute forme de dumping social, etc.

Toutefois, bien que l’ensemble des investisseurs des Plaines-du-Loup paye la même redevance annuelle de 5%, pour la grande majorité sur une valeur du terrain identique (CHF 600.- par m2 de surface de plancher déterminante (SPd), à l’exception des programmes en marché libre et en PPE), il y a de très grandes disparités dans la qualité écologique et sociale des projets et dans ce qu’ils apportent au quartier et au bien-vivre ensemble.

Ce sont d’ailleurs bien souvent les coopératives d’habitants qui apportent le plus de diversité et d’innovation, qui présentent le plus d’espaces communs, d’échanges et de partage, le plus de variété de logements ou qui intègrent le plus de matériaux biosourcés tel que le bois dans leur construction.

Si il est donc essentiel de poursuivre et de renforcer la politique en faveur des coopératives d’habitants, il serait aussi utile de proposer pour tous les types d’investisseurs des incitations financières encourageant au développement de projets les plus exemplaires possibles et à l’innovation. En ce sens, le montant de la rente du droit distinct et permanent de superficie (DDP) pourrait être adaptée en fonction de la qualité sociale, écologique et économique des
projets développés, comme le font déjà les villes de Genève ou Zürich par exemple. D’autres incitations financières pourraient également être envisagées, en agissant par exemple sur le montant de l’impôt foncier ou sur le prix de vente de l’énergie.

A titre d’exemple, les rentes des DDP pourraient varier à l’avenir entre 3 et 6 %, avec des diminutions de quelques dixièmes de pourcent pour le respect d’exigences énergétiques particulières, pour le choix de matériaux écologiques (bois suisse, isolant naturel, etc.), pour la qualité des aménagements extérieurs (perméabilité des sols, arborisation, agriculture urbaine, etc.), pour l’intégration de certains types de logements (logements protégés ou hautement adaptés, pour étudiants, appartements relais, etc.), pour la mise à disposition d’espaces communs pour les habitants, pour des loyers abaissés pour les activités, pour des projets amenant de la recherche et de l’innovation dans le bâti, la vie sociale ou la mobilité, etc.

Une nouvelle méthodologie de calcul pourrait notamment s’appliquer aux prochains DDP des écoquartiers des Plaines-du-Loup, des Prés-de-Vidy ou de Malley et sur les éventuels DDP de bâtiment acquis par la Ville de Lausanne via la Loi sur la préservation et la promotion du parc locatif (LPPPL).

Sur la base des différents éléments exposés ci-dessus, le présent postulat invite la Municipalité à

  • étudier l’opportunité de faire évoluer les principes définissant les rentes de droit distinct et permanent de superficie (DDP), afin de les rendre dépendantes de la qualité sociale, écologique et économique des projets développés, notamment selon les pistes évoquées ici. Il propose également d’évaluer d’autres possibilités d’incitations financières (impôt foncier, prix de l’énergie, etc.) permettant d’améliorer la qualité des projets.

Valéry Beaud, Daniel Dubas, Maurane Vouga, Ilias Panchard, Xavier Company, Sima Dakkus