Postulat

L’exposition aux écrans augmente de manière inquiétante, en particulier en ce qui concerne les enfants. Il est désormais difficile d’échapper à leur présence, d’autant plus lorsqu’ils diffusent des images animées. Afin de laisser des moments de respiration numérique à la population, ce postulat propose modestement de supprimer les images animées projetées sur les écrans présents dans les bus des transports publics lausannois pour les remplacer par des images publicitaires fixes.

En février 2021, nous avions fait part à la Municipalité de notre inquiétude face à la multiplication des écrans dans les bus des transports publics lausannois (ci-après TL) et en particulier de l’installation d’écrans latéraux (en plus des écrans déjà fixés dans le sens de la marche) qui font face à l’espace réservé aux poussettes et aux chaises roulantes. La mise à disposition des usagères et usagers de ces dernières des « informations voyageurs » (soit le nom des arrêts à venir, la durée estimée de leur atteinte et les correspondances possibles) avait alors été avancée comme justification pour la pause de ces écrans latéraux, pour répondre aux exigences de l’Office fédéral des transports. Depuis, ils se sont donc systématisés.

Or, il se trouve que ces écrans ne projettent pas seulement ces « informations voyageurs », mais également des images publicitaires. Jusqu’à présent, les images publicitaires animées (ou « vidéos », par opposition aux images fixes) n’étaient pas hégémoniques, mais la tendance semble avoir évolué ces derniers mois. Il est désormais difficile de résister à l’attrait de la permanence de ces images en mouvement présentes dans les bus, en plus des stations de métro (à moins d’avoir les yeux rivés sur un livre, un journal ou… un smartphone !). La difficulté se renforce lorsque l’on accompagne de jeunes enfants installés dans des poussettes ou sur les sièges faisant face à l’avant du bus (soit la majorité des sièges), ceux-ci ayant encore plus de peine à résister à l’appel de l’image en mouvement.

Or l’exposition intensive aux écrans, et a fortiori aux images animées, est devenue un grave problème de santé publique, en particulier concernant les enfants. Les effets négatifs de l’exposition des jeunes enfants aux écrans sur le lien social et le fonctionnement du cerveau sont en effet largement documentés, comme l’illustre une méta-analyse sur le lien entre temps d’exposition et développement du langage, parue en 2020 dans le journal de l’association américaine de médecine Pediatrics.[1] L’usage d’images animées par la Municipalité pour promouvoir ses activités et celles qu’elle soutient entre par ailleurs en contraction avec la campagne de prévention intitulée « – d’écran, + de… » qu’elle a relancée en 2021 en recourant à différents supports de diffusion, dont des… écrans.

C’est pourquoi une seconde question orale a été adressée à la Municipalité en mai 2023 pour demander des explications concernant la multiplication sur ces supports d’images animées (y compris des animations de « zoom-dézoom » sur certains éléments de texte projeté sur des images fixes dans le seul but de créer la « disponibilité de temps de cerveau » des usagères et usagers des TL). La réponse de la Municipalité consistant à justifier cela par la réutilisation des images animées produites pour les réseaux sociaux ne nous semblent de la loin pas satisfaisante. En effet, les images animées ne sont rien d’autres que des images fixes qui se succèdent et une simple capture d’écran permettrait d’obtenir toutes les informations portant sur les activités de la Ville sur une image fixe à projeter telle quelle. Et même si la formule actuelle devait se justifier pour des raisons de coût, il nous paraît étonnant que les sommes ainsi économisées pèsent plus lourd dans la balance que la santé des usagères et usagers et le développement du cerveau des enfants lausannois.

Ce sont les raisons pour lesquelles nous déposons ce postulat invitant la Municipalité à revoir sa position concernant les trois types de publicités projetées sur ces écrans : municipales, celles bénéficiant du soutien financier de la Ville et les publicités commerciales.

Conclusions

Le présent postulat invite la Municipalité à étudier l’opportunité de :

  • Remplacer les vidéos de promotion de ses activités projetées dans les bus TL par des images fixes en vertu du devoir d’exemplarité des pouvoir publics.
  • Exiger des activités sportives, culturelles, etc. qu’elle soutient financièrement d’en faire de même.
  • Négocier avec les TL la suppression des images animées au profit d’images fixes pour les publicités commerciales.

[1] Madigan S, McArthur BA, Anhorn C, Eirich R & Christakis DA. (2020). Associations Between Screen Use and Child Language Skills: A Systematic Review and Meta-analysis. JAMA Pediatrics, 174(7), 665–675. doi:10.1001/jamapediatrics.2020.0327