Impôt anticipé : une réforme avec beaucoup à perdre et peu à gagner
par Sophie Michaud Gigon, Conseillère nationale
Dimanche, nous votons sur un projet d’abolition de l’impôt anticipé sur les obligations, une réforme fiscale de plus du conseiller fédéral Ueli Maurer, qui ne bénéficie ni aux ménages ni aux PME de notre pays. Cette suppression constitue une perte de recettes fiscales à court terme d’1 milliard de CHF selon le Conseil fédéral, puis plusieurs centaines de millions par année. Alors que les pertes fiscales sont certaines, les gains sont eux plus qu’hypothétiques. Un pari risqué où l’on a donc beaucoup à perdre et hélas bien peu à gagner.
Qu’est-ce que cet objet et pourquoi c’est important ?
L’impôt anticipé est un instrument de lutte contre la fraude fiscale, qui avait été créé compte tenu du secret bancaire. C’est un impôt d’un taux fixe de 35% que la Confédération prélève sur les dividendes et les intérêts d’actions et obligations, et qui est ensuite remboursé lorsque ce revenu est déclaré. Il joue ainsi le rôle d’impôt garantie avec une fonction incitative qui a pour but d’inciter le contribuable à déclarer son revenu spontanément. Cet objet de votation vise à supprimer l’impôt anticipé sur les obligations suisses, sur les fonds obligataires, ainsi que le droit de timbre sur les obligations suisses. Tout cela pour des pertes fiscales chiffrées par le Conseil fédéral à 1 milliard de CHF dès l’abolition et 215 à 275 millions par année (en fonction des taux d’intérêts, plus ceux-ci sont élevés plus les pertes le sont aussi).
D’un côté le Conseil fédéral fustige les dépenses du Parlement (à raison en ce qui concerne les 2 milliards supplémentaires octroyés au budget de l’armée) et de l’autre, il concocte un allègement fiscal qui concerne bien peu de monde mais dont les conséquences sur les finances publiques auront un impact généralisé.
En pleine crise climatique et énergétique, les VERT-E-S ont clairement d’autres priorités. Une décision responsable en 2022 est d’accélérer l’assainissement énergétique et la production d’énergies renouvelables, ainsi que de soutenir de manière ciblée les ménages qui ont le plus de difficultés à surmonter la crise.
Des effets très limités et hypothétiques pour l’économie nationale
Les effets positifs de l’abolition de cet impôt sur l’économie nationale sont limités, tant pour le nombre d’entreprises auxquelles elle bénéficie, que pour son potentiel d’émission de nouvelles obligations, vertes notamment, en Suisse. Les habitant-e-s suisses déclarerons toujours l’impôt anticipé sur les intérêts de leurs avoirs bancaires, quant aux PME, elles ne se financent pas par le marché des obligations, mais principalement par des crédits bancaires. En 2021, la Confédération l’a publié : 99% des PME ne se financent pas par des obligations et les 1% restant ne l’a pas fait au cours des 12 derniers mois qui ont précédé l’étude (Source : SECO). Cela ne concerne donc que quelques grands groupes internationaux. Quant aux nouveaux emplois que cela créerait, personne n’a pu chiffrer de combien d’emplois il s’agit vraiment, ni dans quels secteurs.
D’autres priorités pour les VERT-E-S : des projets de société et une fiscalité écologique
Au lieu de toujours privilégier certaines branches données, et toujours les mêmes, les VERT-E-S ont d’autres priorités dans le domaine fiscal: se préoccuper des gens, de nos PME et introduire des instruments de fiscalité écologique pour inciter à produire et à consommer différemment, ainsi que taxer les activités les plus nuisibles à l’environnement.
Pour le climat et pour l’autonomie énergétique de notre pays, il est urgent de mettre en place un programme d’investissements stratégiques permettant un impact positif pour la population, pour l’environnement et pour les emplois. Les VERTS souhaitent créer des emplois dans des secteurs-clés qui bénéficieraient à l’ensemble du pays.
Quant au projet d’Ueli Maurer et de la majorité du Parlement, il ne cible pas les bonnes priorités et dessert in fine la population et la transition écologique.
Alors dimanche 25 septembre, votez NON à l’abolition de l’impôt anticipé.