Interpellation

Depuis plusieurs mois, des migrants d’Etats non européens sont poursuivis pénalement, ou risquent de l’être, pour avoir présenté au Service cantonal des automobiles des permis de conduire considérés par ce dernier comme faux.
Or les récits de ces personnes sont concordants : si certains espéraient échanger leur permis de conduire national contre un permis de conduite suisse, beaucoup d’entre eux n’avaient même pas cet espoir. Au guichet du Service cantonal des automobiles, alors qu’ils se renseignaient sur les formalités pour l’obtention d’un permis suisse, on leur a demandé s’ils étaient en possession d’un permis délivré par leur Etat d’origine. Ravis, la plupart ont répondu par l’affirmative et on fait venir leur document du pays.
Compte tenu des différences d’exigences, de type de conduite et de signalisation, il n’y a de fait a priori aucune chance pour qu’un permis, même reconnu comme valable, permette de passer outre la course de contrôle. Par conséquent, les personnes sont non seulement amenées à nourrir de faux espoirs, mais sont de plus ensuite accusées d’avoir fourni un document considéré comme faux. Notons à ce sujet que, dans de nombreux cas, il est bien difficile de savoir ce qu’est un « vrai » permis de conduire. En effet, dans certains pays, la procédure d’obtention de celui-ci est flottante, les examens théoriques sont lacunaires ou inexistants.
Compte tenu des éléments exposés ci-dessus, nous demandons au Conseil d’Etat de bien vouloir répondre aux questions suivantes :

  • Quel regard le Conseil d’Etat pose-t-il sur la façon de procéder du Service cantonal des automobiles ? Des personnes souvent fragilisées par leur vécu et soucieuses de se montrer irréprochables face à la justice suisse (puisqu’en procédure de demande d’asile) ne sont-elles pas poussées à l’erreur par la demande qui leur est faite de fournir des documents qui auront toutes les chances d’être invalidés ?
  • Puisque la plupart des personnes viennent de pays sans convention concernant la reconnaissance des permis de conduire et qu’ils doivent de toute manière faire une course de contrôle, le Conseil d’Etat ne pense-t-il pas qu’il serait plus judicieux et plus économique (tant pour la personne que pour la justice suisse qui doit ensuite se pencher sur des délits concernant la production de faux) d’inviter les candidats à suivre toute la procédure de permis en Suisse en les rendant tout de suite attentifs aux risques de fournir le document avec lequel ils ont roulé dans leur pays d’origine ?

Céline Ehrwein Nihan