Le report modal requiert de favoriser la multimodalité : offrons à celle-ci les outils multiples nécessaires !

Postulat

Une étude de l’EPFL parue il y a quelques jours seulement (co-commanditée et co-financée par le Canton [DGMR]) a mis en lumière l’évolution extrêmement marquée des habitudes de mobilité dans notre canton, qui s’inscrit d’ailleurs en droite ligne des développements constatés à l’échelle suisse et internationale : les vaudoises et les vaudois sont de moins en moins dépendants d’une forme de mobilité (par hypothèse le véhicule individuel motorisé), mais privilégient toujours plus la « multimodalité », c’est-à-dire le fait d’utiliser plusieurs modes de transport complémentaires lors d’un seul et même trajet[1]. A titre d’exemple, pour aller à un rendez-vous au siège du CIO à Lausanne, une personne domiciliée à Suchy pourra rejoindre la gare de Chavornay en vélo ou en voiture, y prendre le train et emprunter un vélo en libre-service ou une voiture en partage disponible à la gare de Lausanne. Ceci en gagnant temps et confort, et en réduisant sa sollicitation des infrastructures routières, par rapport à un trajet utilisant exclusivement la voiture.
L’EPFL le relève : l’utilisation de la voiture diminue alors que celle des autres moyens de transport (marche comprise) augmente sensiblement. Cette tendance est encore plus nette chez les moins de 35 ans, qui sont de moins en moins nombreux à disposer d’une voiture en tout temps et choisir ce mode de transport comme unique. Plus largement, l’utilisation des transports publics elle-même n’est pas non plus exclusive, mais se voit souvent complétée de façon essentielle par la marche ou le vélo. Dans l’ensemble, 40% des vaudoises et vaudois utilisent régulièrement plusieurs modes de transports et un tiers le font de manière occasionnelle[2].  
Cette évolution favorable à toutes et tous a été rendue possible notamment par le très bon développement par le Canton de l’offre en transports publics, ainsi que par les mesures prises dernièrement pour favoriser la mobilité douce – deux points que les soussigné.es relèvent avec satisfaction. Il s’agit maintenant de s’assurer du développement des conditions favorables à accroître la multimodalité dans ce contexte – et ainsi renforcer encore le report modal en faveur d’autres formes de mobilité que la voiture individuelle motorisée. Un point central pour les vaudoises et vaudois résidant ou se rendant dans un lieu plus difficilement connecté aux transports publics – à l’image de l’exemple donné en introduction.
On le sait, la multimodalité impose d’agir sur plusieurs plans en même temps – une action unique sur un point particulier n’étant pas suffisante. Il faut aussi se concentrer sur des domaines pour lesquels le Canton dispose d’une compétence claire. Pour ce faire, il est notamment essentiel d’assurer :

  • une desserte en transports publics forte et touchant des « pôles » répartis sur l’ensemble du territoire ;
  • des aménagements routiers sécurisés permettant de favoriser le vélo et le vélo électrique pour rejoindre ces pôles ;
  • des infrastructures permettant d’accueillir, dans ces pôles, les véhicules utilisés pour les rejoindre, notamment par des « P+R » (pour les véhicules motorisés) et des vélostations de grande capacité (pour les vélos et vélos électrique) ;
  • le développement d’une offre forte et granulaire de partages de véhicules, notamment par un réseau de vélos en libre-service et de voiture en partage (car sharing).

Les deux derniers éléments sont particulièrement importants à l’heure où les CFF – et d’autres entreprises de transport public – cherchent à limiter le nombre de vélos et vélos électriques embarqués[3]. Une évolution que l’on doit déplorer, mais avec laquelle il faut savoir travailler.
Afin de favoriser l’évolution constatée très récemment par l’EPFL, et qui permet de répartir de la façon la plus efficiente la charge sur nos infrastructures de mobilité (routes, rail, etc.), il est impératif que le Canton mette ces développements au centre de sa stratégie. Ceci notamment dans le cadre de sa très attendue stratégie vélo 2030. Et à la suite du financement cantonal déjà adopté par le Grand conseil en 2019 pour les interfaces multimodales de transport public[4].
En conséquence, le présent postulat demande au Conseil d’Etat de tirer un bilan des mesures prises en matière de multimodalité dans sa stratégie générale de mobilité et d’intégrer les critères nécessaires pour la favoriser dans les stratégies sectorielles mises en place.
David Raedler


[1] Dans l’ensemble : Etude du Laboratoire de sociologie urbaine del’EPFL, résumée ici https://actu.epfl.ch/news/mobilite-douce-et-transports-publics-seduisent-les/. Egalement https://www.24heures.ch/en-10-ans-les-vaudois-sont-devenus-multimodaux-131892639253.
[2] Un constat déjà tiré en mars 2020 par le même laboratoire de l’EPFL : https://actu.epfl.ch/news/une-mobilite-multimodale/.
[3] Voir à titre d’exemple la très récente décision des CFF concernant la réservation obligatoire appliquée aux cycles, dès mars 2021 (https://www.nzz.ch/schweiz/die-sbb-fuehren-eine-reservationspflicht-fuer-den-veloverlad-im-fernverkehr-ein-ld.1587750).
[4] https://www.vd.ch/fileadmin/user_upload/accueil/fichiers_pdf/EMPD-EMPL/EMPD_123_%C3%A9tudes_et_r%C3%A9alisation_des_interfaces_de_transport_de_voyageurs.pdf.