Le comité unitaire pour un salaire minimum cantonal lance la récolte de signatures pour 2 initiatives populaires pour vivre dignement de son travail.

Le comité unitaire pour un salaire minimum cantonal annonce ce vendredi 12 mai le lancement de la récolte de signatures de 2 initiatives populaires cantonales. La première, constitutionnelle, propose d’ancrer le principe dans la Constitution ; la seconde propose une nouvelle loi instituant un salaire minimum de CHF 23.- brut et détaillant son application. A l’instar de ce qui s’est déjà concrétisé dans plusieurs cantons voisins, le salaire minimum lutte contre le phénomène des travailleurs pauvres et la discrimination des femmes, évite que des personnes se retrouvent à l’aide sociale et donne un référentiel minimal facilement vérifiable et contrôlable par tou-te-s les employeurs-ses et employé-e-s. La récolte de signatures s’étend jusqu’au 12 septembre.

Une vingtaine d’organisations vaudoises lancent ce jour la récolte de signatures pour introduire un salaire minimum de CHF 23.- dans le Canton de Vaud. La coalition réunit des syndicats, des partis, des associations et mouvements. Le but est de récolter d’ici au 12 septembre les 12’000 signatures valables pour permettre une votation cantonale sur le sujet. Il s’agit de la seconde tentative cantonale après un premier essai en 2011, qui avait échoué à un petit pourcent près en votation. C’est la première depuis que le dispositif des salaires minimaux cantonaux a été validé par la plus haute juridiction du pays.

Travailler ne doit pas rimer avec pauvreté

Pour le comité unitaire, chacun-e doit pouvoir vivre de son travail. Ce n’est pourtant pas le cas pour l’ensemble des salarié-e-s. Un peu moins de 10% des salarié-e-s vaudois-es sont à bas salaires et un peu moins de 8% sont à considérer comme working-poors. Ajoutons que ces statistiques officielles sous-estiment les difficultés financières des salarié-e-s à bas salaires, surtout durant cette période où les biens de consommation de première nécessité et les primes d’assurance-maladie prennent l’ascenseur. Les bénéficiaires immédiats de ces initiatives sont les travailleurs pauvres et les travailleurs-ses à bas salaires, c’est-à-dire ceux qui gagnent moins que les 2/3 du salaire médian. Il s’agit dans notre canton notamment de salarié-e-s de l’industrie alimentaire et manufacturière, de nettoyage et conciergerie, des services à la personne, du commerce et de l’hôtellerie-restauration. Le salaire minimum aura aussi un effet en faveur de la revalorisation des salaires supérieurs.

 Deux initiatives qui se complètent

Le comité unitaire a décidé de lancer 2 initiatives populaires, l’une pour ancrer le principe dans la Constitution, l’autre pour définir le niveau du salaire à CHF 23.- en 2023 et son dispositif d’indexation ainsi que son champ d’application. Les textes sont conçus en miroirs ; l’une ne peut entrer en force sans l’autre. La loi prévoit des exceptions et des dérogations (pour l’agriculture) sur le modèle de ce que d’autres cantons ont fait ; si les emplois d’insertions feront exception, la lutte contre les faux stages est dans la cible de l’initiative. La loi prévoit également la mise en place d’un organe de contrôle et l’implication des partenaires sociaux dans les contrôles. Ce nouvel outil de lutte contre la pauvreté complète les conventions collectives de travail (auquel il s’applique également) et les prestations complémentaires aux familles.

Un salaire décent, c’est une question d’égalité

Les femmes sont largement surreprésentées dans les emplois à bas salaires : elles sont deux fois plus nombreuses que les hommes à être dans cette situation. Ceci perpétue également des inégalités à la retraite ; les femmes disposent toujours de rentes cumulées du 1er et 2ème pilier d’un tiers inférieur à celle des hommes. Le salaire minimum cantonal est donc un instrument de lutte contre les inégalités entre hommes et femmes. A l’aube de la mobilisation féministe du 14 juin, le lancement de cette initiative s’inscrit aussi dans la réalisation des revendications historiques de la grève des femmes de 1991 et la concrétisation de l’égalité inscrite dans la Constitution.

Un salaire minimum pour l’intégration

Les salarié-e-s de nationalité étrangère sont deux fois plus nombreux-ses que les Suisses à être touché-e-s par le phénomène des travailleurs pauvres. C’est un important facteur de précarité et un obstacle à l’intégration dans un pays où la vie est chère. C’est une discrimination d’autant plus grave que l’accès à la nationalité suisse pour de nombreux-ses travailleurs de longue date dans notre pays dépend aussi de leur situation économique. Le salaire minimum permettra de lutter contre les abus patronaux et le le travail précaire dont sont victimes les travailleur-euse-s étranger-ère-s.

Une question sociale

En complémentarité avec les PC familles, le salaire minimum cantonal participe à la lutte contre la pauvreté des salarié-e-s. Nos initiatives évitent que les collectivités publiques (cantons et communes) voient la facture sociale augmenter du fait de bas salaires. La définition d’un salaire minimum s’appliquant en principe à toutes les branches a aussi un effet de publicité auprès de tou-te-s les employeurs et salarié-e-s de référentiel clair et facile à respecter ou faire respecter.

Un enjeu national

L’introduction d’un salaire minimum à l’échelle vaudoise s’explique par la compétence exclusivement cantonale en matière de politique sociale, mais notre canton n’est pas le seul, et encore moins le premier, à introduire un tel système. Les cantons de Neuchâtel, Jura, Neuchâtel, Genève, Tessin et Bâle-Ville disposent déjà de telles lois. Des projets sont en cours à Zürich, Winterthour, Valais et Fribourg. Tous ces dispositifs cantonaux pourraient être menacés par la motion Ettlin qui a été adoptée à une très courte majorité par le Parlement et qui veut faire primer les conventions collectives étendues sur les lois et Constitution cantonale. Les initiatives vaudoises s’inscrivent dans notre volonté de défendre un salaire décent pour tou-te-s les travailleuses et travailleurs, avec ou sans collective. Face à l’absence de considération de la majorité politique nationale comme cantonale pour le maintien du pouvoir d’achat des salarié-e-s dans un contexte d’inflation inédit, notre campagne est devenue indispensable pour réaliser une revalorisation des métiers essentiels et remettre la question salariale au centre des préoccupations.